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AGANOVICH – Retour aux sources

Aganovich est une de ces histoires d'amour qui défient les conventions. Nana Aganovich, diplômée de Central Saint Martins, et Brooke Taylor, écrivain et entrepreneur, sont tombés éperdument amoureux à Londres. Depuis,...

Aganovich est une de ces histoires d'amour qui défient les conventions. Nana Aganovich, diplômée de Central Saint Martins, et Brooke Taylor, écrivain et entrepreneur, sont tombés éperdument amoureux à Londres. Depuis, les deux créateurs de la marque vivent une relation riche d’émulation et d'idées audacieuses, et entretiennent un partenariat hypnotisant et créatif. Installé à Paris, le couple se réinvente jour après jour, développant des histoires captivantes qui alimentent des créations uniques, déconstruites-reconstruites... Leurs plus récentes initiatives sont nées de leur prise de conscience politique croissante à l’égard des chaînes de production liées à la mode, et de leur désir d'explorer, de transcender leur identité créative à la suite de leur saut imminent dans la haute couture.

Un vent de changement souffle autour d'Aganovich...
Nous avons repensé ce que nous voulions faire, dans la vie et dans l'industrie. Une fois le prêt-à-porter enlevé de la table, nous nous sommes sentis prêts pour une nouvelle stratégie, qui nous conviendrait mieux, et nous nous sommes demandés si nous pouvions hisser notre ligne principale à la haute couture en 2018. Il y a aussi eu une certaine pression à penser plus « commercial ». Normalement cela signifie produire un tas de choses plus simples pour moins cher. Mais quand on fait des choses plus faciles, moins chères, on sait que 800 € pour la robe au lieu de 2 000, les acheteurs ne sont pas vraiment intéressés. Même si c'est bien fait, ils disent: « Non, les gens veulent des choses incroyables, ils ne veulent pas de vos trucs dilués … » Nous avions donc besoin d'un peu de temps pour comprendre ce que pourrait être notre publicité et nous avons trouvé trois idées : c'est ce que nous avons fait cette année, voir si chacune d’entre elles pourrait fonctionner.

 

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Trois idées ?
D’abord, notre premier parfum, Murder the Moonshine. Avec succès. Ensuite, Nana regardait beaucoup de documentaires sur la politique autour de la production de mode, comme The True Cost. Elle devenait vraiment contrariée. Même si cela n'affecte pas directement la haute couture, nous avons pensé que nous devions faire quelque chose. N'importe quoi. Nous avons donc élaboré un projet éthique intitulé The Invisible Act. C'était une tentative d’entamer, du moins pour nous-mêmes, un dialogue sur ce qui est éthique et de demander à nos fournisseurs d'où viennent les choses, et comment elles sont fabriquées. C'est super compliqué : d'où vient le fil, où le métal des boutons a été extrait, et ainsi de suite...

Comment créez-vous un dialogue au sein de The Invisible Act, en dehors de vos questions aux fournisseurs?
Nous nous sommes tournés vers Kickstarter comme plateforme de financement. Nos banquiers nous avaient signalé Kickstarter il y a quelques années. Nous avons pensé que cela pourrait fonctionner parce que c'est très ouvert, comparé à la haute couture. Et ça a marché. Le but était de créer une veste. Nous l'avons lancé en mai, et atteint notre objectif de financement en juin. À travers cette veste que nous avons fabriquée, nous avons pu remonter à la source de chaque étape. Cela a ouvert un tout nouveau secteur pour nous. Le projet est appelé The Invisible Act par Aganovich parce que les bonnes choses que les gens initient sont si souvent négligées, éclipsées par les mauvaises choses qui sont perpétrées. Nous livrons la veste maintenant aux personnes qui l'ont achetée sur Kickstarter. C’est amusant de découvrir un territoire qui nous est inconnu et informel, un pur produit de notre époque. Vous échangez avec les gens simplement. Il n’y a pas ce sentiment d’exclusivité comme dans la haute couture.

 

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Utiliserez-vous à nouveau cette méthode dans le futur?
Nous avons décidé d'organiser un Kickstarter tous les 2 à 6 mois, en lançant une autre pièce, capitalisant sur ce que nous avons appris et en allant un peu plus loin. Je pense que la prochaine sera en polyester recyclé. Avant, vous pouviez recycler le polyester pour fabriquer un vêtement, mais vous ne pouviez pas recycler le vêtement lui-même. Aujourd’hui, un de nos fournisseurs a compris comment recycler les vêtements. C'est comme un laboratoire. Peu à peu, nous allons distiller ces choses dans notre activité principale. Tous les six mois, nous ferons une version de base pour le grand public à un prix abordable, juste pour le World Wide Web.

La haute couture comme activité principale, c'est votre prochaine étape?
Nous allons intégrer ces pièces dans la prochaine collection, les personnaliser avec des modifications plus importantes et des prix plus élevés. Et nous allons aussi apprendre à tirer parti des leçons que nous avons apprises et ainsi enrichir la ligne principale. La mode doit avoir une certaine indépendance, même si nous allons y insuffler cette expérimentation éthique qui est notre démarche aujourd’hui.

 

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Cette histoire de tee-shirt… de quoi s’agit-il?
J’organisais des fêtes dans une autre vie. J'ai brièvement travaillé avec Dov Charney (PDG d'American Apparel), pour organiser un évènement à L.A. C’était un vrai beatnik, obsédé par tous les poètes de la Beat generation. Il a vécu sur la route pendant un certain temps, il a sillonné l’Amérique en bus. Il y a chez lui quelque chose d'indompté. Il est plein d'énergie et aime les affaires. Il était en avance sur tout le monde en matière de Made in America – l'approvisionnement local et la fabrication façon « intégration verticale ». Il vient de démarrer une nouvelle entreprise, Los Angeles Apparel. Il a un grand cœur, ses employés l'adorent. C’était le cas à l'époque et ça l’est encore aujourd'hui : il paie au-dessus du salaire minimum, s'occupe des familles, essaie de faire avancer la paperasse en matière d'immigration…

Comment passe-t-on de American Apparel à Aganovich? 
Nous sommes allés le voir. Il habite dans l'ancienne maison de Charlie Chaplin, où nous sommes allés, en début de soirée. Il n'était pas encore rentré, alors nous l'avons attendu tandis que le soleil se couchait sur la colline. Nous nous posions de vraies questions : « Que fait-on ici ? À littéralement 20 000 kilomètres de chez nous, chez un mec rencontré il y a quinze ans. » Lorsqu’il est arrivé, il a dû nous prendre pour des extraterrestres. Nous étions habillés de manière très… Aganovich. Il a commencé avec un « Vous arrivez d’où comme ça ? » avant de poursuivre, disant « je ne sais pas comment vous avez atterri ici mais d'accord, allons-y, faisons cette réunion… » Et nous lui avons expliqué : « L’idée, c’est que tu nous donnes ton tee-shirt. On va prendre tes vêtements, et les ruiner, en gros. » Nous avons ramené le tee-shirt à Paris, l’avons retourné dans tous les sens dans l’atelier, pour voir ce qu’on pouvait en faire. Ensuite, nous avons pris quelques photos chez Nana en été. Les images sont toutes prises sur un lit, à cause du coton. 

Regardez ces photos d'il y a quelques années, de Nana qui se réveille au soleil. Nous avons essentiellement shooté le modèle d'en haut pour créer un effet froissé… Ensuite, on s’est complètement lâchés : nous avons renversé les tee-shirts, nous les avons cousus ensemble, nous avons fait un pantalon, assemblé 2 ou 3 tee-shirts ensemble pour  faire des robes. Même nos amis étaient perdus… ils savaient que nous avions ce projet de tee-shirt, mais dans leurs têtes, nous allions juste vendre… des tee-shirts.

 

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Cette collection est-elle présentée comme Aganovich x LA Apparel ?
Non, ce sont des pièces Aganovich. On a gardé les étiquettes de Los Angeles Apparel, non seulement pour l'histoire et la passion, mais aussi pour la crédibilité. C'est un projet commercial – le prix est moitié moindre que ce que nous facturons d’ordinaire. Il s'agit d'un tissu que nous n'utiliserions pas en temps normal, mais il permet à Aganovich d'être plus décontracté et de franchir la barrière du jour et de la nuit, que la plupart de nos créations ne franchissent pas. Et nous pouvons livrer ces pièces deux fois plus vite. Leclaireur l'a achetée en octobre, ce qui était super excitant. Jusqu'à la dernière minute, on ne savait pas si ça allait marcher. Dov et son équipe sont heureux également, ils n'arrivent toujours pas à comprendre, mais ils sont ravis de faire parti de cette aventure. 

Alors, quelle est la prochaine étape ? Prêts pour 2018 ?
Nous sommes en constante ébullition, parce que nous ne savons jamais quelles idées vont porter leurs fruits. Quand on sort du calendrier prêt-à-porter, rien n’est garanti. Mais nous avons eu deux réunions à propos de la haute couture, et tout semble avancer dans la bonne direction.

 

Comme Aganovich, revenez aux origines, chez Leclaireur Hérold.

 

 

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